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Gestion Publique : "Le blues des DRH"

In Le courrier n°229 de la Fédération des Finances CGT ( 26/09/05)

L’IGPDE (Institut de la Gestion Publique et du Développement Economique), dépendant du MINEFI, chargé de la formation des cadres) organise des "Rencontres internationales de la Gestion Publique".

Les 4ème Rencontres organisées en mai dernier avaient pour thème : "Performance, l’ère des Ressources Humaines ".

La lecture du compte rendu de ces rencontres publié par l’IGPDE (Perspective/Gestions Publiques n°15 JUIN 2005) mérite quelques commentaires.

On y découvre, au fil des comptes rendus des débats et des thèmes abordés, des évidences élevées au rang de découvertes, des présupposés non démontrés, des innovations qui n’en sont pas, une bouffée délirante, une soif de reconnaissance et quelques vérités avouées sans oublier les questions qui n’ont pas été posées.

Quelques portes ouvertes enfoncées...

Les participants parviennent, à l’occasion des diverses tables rondes au constat selon lequel "la performance d’une organisation est liée à celle des agents qui y travaillent".

A l’issue d’une demi journée de débat émergent des "axes d’analyse" dont "l’établissement du lien entre l’individu et la performance d’une organisation" d’où "l’émergence de la notion de capital humain".

Cette notion a été mise en avant par un certain Mr Blair, directeur de l’OPM (Office of Personnel Management, autorité responsable de la gestion des ressources humaines de la Fonction publique Fédérale des Etats-Unis).

A croire que ce haut cadre dirigeant méconnaît quelque peu la littérature économique - il est vrai essentiellement européenne -... du XIXème siècle.

Autre découverte : "II existe bel et bien un lien entre l’épanouissement dans le travail, la satisfaction et la motivation des employés et la bonne marche de l’organisation ".

Cela est confirmé par le responsable de la Formation des cadres dirigeants de la Fonction Publique Fédérale allemande "qui établit une relation directe entre administration moderne et (...) fonctionnaires motivés ".

En résumé on convient donc que le résultat obtenu par un collectif de travail est la somme des travaux réalisés par les membres de ce collectif et qu’un fonctionnaire qui s’épanouit au travail est... efficace dans son travail.
Tout cela est regroupé dans un article au titre détonnant "People come first" assorti quand même d’un point d’interrogation. Ce titre serait "la formule qui reflète le mieux l’ambition de considérer l’individu comme acteur du système".

Comment traduire ce titre ?
Cela peut donner "les gens viennent en premier ", ou "le peuple d’abord ", ou peut être "tout le pouvoir au peuple" ?
On se prend à rêver que, le colloque se poursuivant, des conclusions soient tirées d’un tel constat, on rêvait...

Présupposés, fausses innovations, vraie bouffée délirante et soif de reconnaissance.

Les participants au colloque ont du remplir un questionnaire. Le résultat est sans appel : "II n’y a pas de gestion des ressources humaines dans la Fonction publique" en France.

Là on ne fait pas dans l’à peu près, dans le détail, c’est clair, net et précis.

Un diagnostic aussi tranché est-il pertinent ?

- Comment s’organisaient et fonctionnaient les administrations publiques d’Etat avant l’apparition de la GRH ?

- N’y faisait-on pas de la gestion des ressources humaines sans le savoir, sans la nommer, sans l’instrumentaliser ?

- N’existaient-ils pas des cadres et chefs de services qui animaient des services, organisaient le travail, veillaient aux promotions des agents aptes à exercer d’autres fonctions ?

Accessoirement, depuis quelques années, les DRH existent et travaillent dans la plupart de secteurs de la Fonction publique française, ils ont bien comme fonction la gestion des ressources humaines, non ?

Après avoir découvert le "capital humain", on en tire les conséquences.
Alors "l’exemple du Canada est éloquent" puisque y est instaurée "l’obligation de consultation au point qu’il y a obligation de création "(...) des comités consultatifs, véritables lieux d’échanges et de discussion, entre les représentants syndicaux et l’autorité administrative, sur les aspects de la vie au travail".

En somme, nos amis canadiens réinventent les Comités Techniques Paritaires vieux d’un demi siècle.

Tout cela est furieusement original et novateur, bref" éloquent ".

Une Noix...Qu’y a-t-il à l’intérieur d’une noix ?

Les participants au colloque insistent beaucoup sur ce qu’ils considèrent comme déterminant : la professionnalisation de la fonction "Ressources Humaines" et l’importance du rôle de "leader".

C’est là qu’émerge une bouffée délirante qui peut surprendre au sein d’une aussi docte assemblée.

Une question est posée - nous n’inventons rien et ne sollicitons pas le texte du compte rendu - "Naît-on ou devient-on leader ?".

Comment peut-on se poser sérieusement une telle question ?

L’état actuel de la science, notamment en matière biologique, permet de formuler autrement la question pour en mesurer l’inanité : Existe-t-il un gêne humain de "leader" ?
Ou bien encore : est-on ou n’est-on pas "naturellement "leader ?

Naturellement leader, cela semble être hélas, l’opinion des participants, selon eux cela "tient au charisme dont fait nécessairement preuve le leader. Cela relève de la personnalité de l’individu (...). Le leader, porteur de changement, (...) sait impulser, mobiliser les énergies ".

Si l’on suit ce raisonnement ( ?) jusqu’au bout, être leader cela ne s’apprend pas, cela est.

- Alors pourquoi toutes ces formations de cadres dirigeants ? -Tous ces colloques ? Toutes ces procédures complexes - et pas toujours probantes - de sélection des cadres ?

- Peut-on rester sérieux et se référer aux capacités de travail, d’analyse, de synthèse, de conviction des cadres dirigeants ?

En filigrane de l’ensemble des travaux on sent un intense besoin de reconnaissance des responsables des ressources humaines car : "il existe un fossé entre les pratiques de gestion des ressources humaines et l’enjeu stratégique qu’elles représentent" et en plus "la formation des hauts fonctionnaires n’est pas du tout axée sur la GRH".

Voilà donc une fonction sous estimée alors qu’on en aurait besoin car " c’est un enjeu crucial des réformes ".

Quelques vérités avouées dont on prend note !

Lorsque sont évoquées les réformes engagées dans un certain nombre de pays, on rappelle sans surprise que "l’un des objectifs des réformes était de réduire les coûts de la Fonction publique".

Plus surprenant, et intéressant, est le bilan dressé de ces réformes à propos des "économies" budgétaires réalisées.
On fera ici quelques longues citations qui ont le mérite - exceptionnel sur ces sujets -du parler vrai.

Que penser du résultat affiché dans les pays où ces réformes ont été les plus importantes et engagées il y a plusieurs années ?

Les participants au colloque apprennent du représentant de l’OCDE qu’après étude menée par cet organisme "ce résultat est largement illusoire et cache en général des changements dans la définition de ce que sont les agents publics et les modifications du périmètre d’intervention des institutions d’Etat vers les collectivités territoriales".

En clair entre l’affichage et la réalité, la distance est grande, les initiateurs des réformes ayant intérêt à vanter les mérites de celles-ci...

On nous explique avec beaucoup de conviction, parfois de suffisance pseudo scientifique que nous avons tout intérêt à procéder à des analyses comparatives entres les différents systèmes de la Fonction publique dans les pays développés pour y déceler les pratiques " vertueuses " et s’en inspirer.

On ne compte plus les études, rapports, colloques et tribunes de presse sur le sujet.

- Et que nous dit à ce propos le responsable de l’OCDE décidément (trop ?) bavard ?

Citation : "Rapportée au PIB des différents pays, la réduction des coûts des administrations publiques apparaît très limitée. Compte tenu des marges d’erreur importantes en cette matière et des variations du PIB des pays, il est impossible de déterminer avec précision si une réduction significative des coûts peut être associée aux réformes mises en œuvre dans les pays de l’OCDE ".

Voilà donc un mythe soigneusement entretenu qui s’effondre.

Autre élément des réformes tant vantées, la modification du statut des personnels, où comme aux Pays Bas, on aligne "le statut des agents publics sur le droit commun du travail et en généralisant le recours à des contrats de droit privé dans la Fonction publique" mettant ainsi fin au "mythe récurrent dans la population du fonctionnaire à vie, impossible à licencier »

- Là encore, la réalité apparaît quelque peu décalée avec ce qui est mis en avant.

Le même représentant de l’OCDE signale à ce propos que "si l’emploi à vie n’existe pas (...) la plupart des personnels font carrière dans la Fonction publique et le licenciement est rare".

Il va même jusqu’à préciser que dans ces pays, les contrats à durée déterminée concernent une population relativement faible : « 7% environ en Nouvelle Zélande, 5% en Suède ».

On constate même que le mouvement de privatisation s’inverse notamment aux ... Etats-Unis avec une "ré internalisation de certains services", exemple donné : "les agents contractuels de droit privé, dans le contrôle aérien, sont-ils devenus des fonctionnaires fédéraux ".

Si le pays qui fait référence se met à réformer dans le mauvais sens, rien ne va plus.

Autre pilier des réformes dont la pertinence devient douteuse : la rémunération à la performance.

Selon les études de l’OCDE, deux tiers des pays appartenant à cet organisme pratiquent la rémunération à la performance.
Voilà qui parait démontrer que presque tout le monde s’y met et que cela doit donc être efficace.

On regarde de plus près et on découvre que sur ces deux tiers des pays, seuls 6 ou 7 "l’ont généralisé à l’ensemble des services publics".

Quant à la part de rémunération en rapport avec la performance, cela représenterait "10% maximum pour les personnels" de la rémunération totale.
On passe donc de presque tout le monde, partout, à pas grand monde et de façon très limitée.

Et les effets de ces mesures ?

Pas terrible, car on concède "un impact limité des incitations financières sur la motivation des agents publics : les perspectives de carrière (...) l’intérêt du travail, en règle générale, plus motivants".
Si on résume, la rémunération à la performance concerne un nombre très limité de fonctionnaires et son impact est faible en terme de motivation.

En fait selon les experts de l’OCDE, cela sert surtout à " renforcer l’impact des orientations et des objectifs " et "constitue le levier pour des changements dans l’organisation du travail".

C’est donc plus une arme idéologique que l’expression de la réelle volonté de rémunérer plus qui sont considérés comme travaillant mieux.

On s’en doutait un peu, mais c’est intéressant de l’énoncer ainsi explicitement.

Les questions qui n’ont pas été posées.

A la lecture du compte rendu de ces 4èmes "Rencontres internationales de la gestion publique", on en vient à se demander pourquoi certaines questions n’ont pas été posées par les participants.

Ainsi, la sous estimation de l’importance de la gestion des ressources humaines semble être un constat très largement partagé, et que tout le monde regrette puisque "le constat est un peu amer".
Il n’est pas de bon ton dans ce type de rencontre de livrer ses états d’âme, mais nous y sommes presque.
Cependant curieusement personne ne s’est demandé - en tout cas à haute voix - pourquoi cette sous estimation de la GRH, quelle est son origine, qui en est responsable.

Le diagnostic est posé mais on s’interdit de réfléchir à la cause de la maladie, curieux ...

A la lecture du compte rendu, le bilan réel des réformes engagées parait peu convaincant en tout cas très ... contrasté.

Là encore, cela ne génère aucune question sur la pertinence des réformes engagées.
Même chose sur la recherche de plus d’efficacité dans les Fonctions publiques.

On constate que la rémunération en lien avec la performance est sans grand effet et en même temps qu’un facteur clé c’est "l’épanouissement au travail" sans se poser de question sur les pratiques sauf à divaguer sur le charisme naturel des leaders dont on attend beaucoup.

Il y a bien refus d’examiner de près quels sont les processus de travail mis en œuvre par les personnels pour en comprendre les mécanismes.

Ainsi on pourrait s’interroger sur le fait qu’une grève du zèle qui consiste à appliquer strictement les consignes provoque ...
.

Y aurait-il des marges d’autonomie autogérées par les personnels ?

Perdre de vue que les services fonctionnent, non pas avec des "ressources humaines", mais avec des hommes et des femmes riches de leur personnalité, de leur expérience, de leur sens du service public, c’est passer à côté de l’essentiel.

Une suggestion : lors du prochain colloque, projeter l’excellent film intitulé : " Ressources humaines " et ouvrir un débat avec les participants ....

Ultime observation : et si les représentants syndicaux des personnels du MINEFI participaient à ces "Rencontres" ?

In Le courrier n°229 de la Fédération des Finances CGT ( 26/09/05)

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