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Le virus du bon "sens" libéral se propage

« La dette est l’ultime fléau », « contre l’allongement de la durée de la vie, cotiser plus longtemps est la seule condition »… Après Jean-Michel Aphatie, le simplisme économique gagne Christophe Barbier et Nicolas Demorand, portant avec lui le « bon sens » ultralibéral.

Au début, on croyait à un simple trouble obsessionnel compulsif qui agitait Jean-Michel Aphatie et le forçait à se secouer sur sa chaise quel que soit l’invité en éructant « la dette ! La dette ! La dette ! » Désormais, notre diagnostic est formel : par son contact prolongé avec la télévision et la radio, l’interviewer de RTL et de Canal Plus est en train de refiler sa fixette budgétaire à tous ses collègues !

Christophe Barbier, adepte du « bon sens ». ©LCI.fr Ainsi Christophe Barbier, qui recevait mardi 20 mai le socialiste Arnaud Montebourg, a été pris d’un tic du même genre quand le député de Saône-et-Loire a évoqué la « provocation » que constituait pour lui le fait d’inscrire dans la constitution l’équilibre des finances publiques à l’occasion de la réforme des institutions en débat à l’Assemblée. « C’est une absurdité ! », a lancé Montebourg. « Mais là, l’équilibre budgétaire, ça relève du bon sens, s’est excité Barbier, de la bonne gestion pour le fonctionnement, ce n’est pas l’investissement qui est concerné. » Droit dans ses bottes, le socialiste a insisté : « Parfois, il est nécessaire qu’il y ait des déficits. » « Pour l’investissement, a répété l’animateur, pas pour le fonctionnement ! » Là, confus et désolé, Montebourg n’a eu d’autre option que de trancher : « ce n’est pas la politique de tout le monde. » Eh oui M. le député, c’est dur mais parfois, il faut dire la vérité aux enfants : « le bon sens », c’est souvent un argument ultralibéral.

Nicolas Demorand : « Cotiser plus pour vieillir plus »
Du côté de France Inter, le « bon sens » de Nicolas Demorand et Philippe Lefébur (directeur du service économie) s’est heurté mardi 20 mai à Jean-Claude Mailly sur la question de la cotisation au régime des retraites. « Taxe sur les profits non réinvestis, augmentation de la cotisation, cotisation sur l’intéressement »… le secrétaire général de Force ouvrière a eu beau égrainer les alternatives, et même annoncer le chiffre de 12 milliards d’euros dégagés par an, Demorand a répliqué par le « raisonnement qui semble logique et de bon sens et qui consiste à dire nous vivons de plus en plus vieux, il est donc normal de travailler de plus en plus longtemps. » Argument suivi de son corolaire habituel pour culpabiliser le chaland : « on travaille plus dans d’autres pays, la France resterait donc une exception ? » Eh oui, pourquoi traiter mieux les Français que les autres ?

Peut-être simplement parce que la solution des 41 annuités ne compensera jamais le déséquilibre entre la génération des babyboomers (démographiquement écrasante) qui va partir en retraite et celle, bien moins nombreuse, qui devra cotiser pour ses vieux jours.

Mais cet argument-là serait beaucoup moins pratique pour les ultralibéraux car il exigerait probablement d’impliquer les profits des entreprises ou des financements publics dans le calcul des retraites

. Alors, pour faire plus simple, on oublie tout simplement le système des retraites par répartition qui veut que chacun cotise pour son père et son grand-père et pas pour sa propre retraite et on invente le « cotiser plus pour vieillir plus » !

Là où la blague devient un peu longue pour les cotisants, c’est que les 41 annuités se heurtent également à l’augmentation et de la durée des études, d’un côté, et au faible emploi des 55-65 ans de l’autre. Le taux d’actif français dans cette fourchette est l’un des plus bas d’Europe (moins de 40%) et les gouvernements successifs ne parviennent pas à l’augmenter ! Conséquence mécanique : tardifs sur le marché de l’emploi, précoce à la retraite, les nouveaux cotisants partiront pour la plupart sans pouvoir mathématiquement aligner toutes les annuités nécessaires à une pleine retraite.

La surinflation allemande en 1920 : les foyers se chauffaient au mark. ©CC Joonasl/Wikipedia.fr La sainte angoisse de la faillite sociale
Car le vrai souci dans ces deux affaires, c’est que ce prétendu « bon sens » n’est en fait que l’emballage familier et simpliste d’une vraie rhétorique anti-étatique primaire. Cette « faillite » annoncée ramène à de belles angoisses sociales qui tétanisent les foules et font courber les têtes : les étiquettes valsant dans les années 1920 en Allemagne, les banques fermant brutalement en Argentine laissant sur le carreau des centaines de clients ruinés dans les années 1990... Dans la bouche de François Fillon, la France y est presque et dans celles de plus en plus d’interviewer, on y va tout droit avec femmes et enfants à cause de cet affreux déficits qui pèse sur la « famille France. »

« Ah ça Monique, c’est complètement impossible de gérer une famille criblée de dettes ! », s’exclamera-t-on en écoutant Jean-Michel Aphatie conspuer les barbares créditophiles. Voilà une thèse d’une simplicité séduisante mais qui ne tient pas longtemps devant un minimum de réflexion critique.

Le bébé français récupère un actif de 11.000 euros

Economiste à l’OFCE, Mathieu Plane livrait en janvier dernier dans Alternatives économiques une réponse argumentée aux déclinistes et autres adorateurs de la faillite : « La dette publique française (64, 2 % du PIB) est inférieure à celle de la zone euro (69,1 %) et de l’Allemagne (67,9 %), approximativement au niveau des Etats-Unis (65 %) et nettement en dessous de l’Italie (107 %) et du Japon (159 %). De plus, la dette au sens de Maastricht est une mesure brute qui ne prend pas en compte les actifs détenus par les administrations publiques. Si on comptabilise l’ensemble des actifs, c’est-à-dire aussi les actifs physiques, les administrations publiques ne présentent plus une dette, mais une richesse nette (37,8 % du PIB en 2006). (…)

Le bébé français ne récupère pas à la naissance une dette publique de 18 700 euros, mais hérite au contraire d’un actif net de 11 000 euros, même s’il est vrai qu’une partie des actifs physiques ne sont pas cessibles et qu’il est difficile de leur donner une valeur marchande ».

« Rien n’indique que l’Etat français soit en situation de faillite »

Pas encore tout à fait sortie d’affaire, la famille modèle de monsieur Aphatie voit déjà le bout du tunnel… Et une surprise attend encore ce foyer qui se croyait condamné dans l’analyse de Mathieu Plane : « la dette publique française est notée AAA par les agences de notation (Standard & Poor’s, Fitch Ratings), la meilleure note qui soit en termes de qualité de dette. La France fait donc partie des meilleurs élèves de la classe mondiale quant à la gestion de ses finances publiques. Cela veut dire aussi que l’Etat français ne risque pas de faire défaut au remboursement de sa dette, ce qui explique par ailleurs la faiblesse des taux d’intérêt sur les obligations publiques (inférieurs à 4 % en moyenne depuis début 2005), considérées comme un placement sans risques ».
Voilà qui devrait stimuler le bon sens de nos journalistes : aux Etats Unis, en Grande Bretagne ou en Espagne, les ménages endettés subissent des taux d’emprunt bien supérieurs à ceux de l’Etat français. Comme l’avait expliqué Jean-Paul Fitoussi au Club de la presse Internet, il est plus rationnel d’endetter l’Etat que les familles. Beaucoup trop compliqué pour Aphatie, Barbier, Demorand et les autres.

Mardi 20 Mai 2008 - 13:52
Sylvain Lapoix et Régis Soubrouillard
site marianne2