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Vous �tes dans la rubrique : > Publications > Analyses Caisse des Dépôts et Consignation : Ressources inexploitées ! Où il sera question de Besoins Publics, de Vent Libéral, d’Outil Financier et de Logement Social. Mais pas seulement. Qualifiée tantôt de bras armé de l’État, tantôt de puissance occulte, la Caisse des dépôts et consignations (CDC) constitue une institution économique et financière méconnue. Dans une logique antilibérale, elle pourrait être un point d’appui pour des politiques économiques alternatives. Par Jean-Philippe Gasparotto Secrétaire du syndicat CGT de la CDC In Rouge 20 janvier 2007 La Caisse des dépôts et consignations (CDC) touche, au travers de ses missions, la vie quotidienne d’un grand nombre de citoyens. La Caisse nationale de prévoyance (CNP), filiale publique de la CDC, est la première société française d’assurance vie, avec plus de 13 millions d’assurés. En outre, la CDC a financé nombre d’infrastructures : ponts, voies ferrées, canaux, autoroutes, écoles, hôpitaux. Mais la CDC joue surtout un rôle majeur dans le financement de l’économie. Avec plus de 30 milliards d’investissements, elle est le premier opérateur sur le marché actions et le premier actionnaire sur les sociétés du CAC 40, ainsi que sur les opérations de capital investissement et de financement des PME. Son statut public fait d’elle un acteur majeur de « l’économie sociale », au capital de plus de 500 sociétés d’économie mixte. Enfin, d’Alstom à la SNCM, en passant par Danone et Suez, la CDC est régulièrement sollicitée pour porter secours aux entreprises françaises menacées d’OPA. Mais, alors qu’elle vient de fêter son 190e anniversaire, la CDC traverse une grave crise de sens et d’identité. Plombée par des opérations successives de démantèlement et de privatisation, la Caisse se trouve à la croisée des chemins. Compte tenu des mutations considérables qu’a connues le secteur financier public depuis vingt ans - la dernière en date étant la création de La Banque postale -, la Caisse des dépôts reste le dernier instrument financier public qui puisse appuyer la mise en œuvre de choix politiques dans le développement économique et l’emploi, le logement, la retraite, la protection sociale... Besoins publics
C’est paradoxalement sous la Restauration, en 1816, qu’est créée la Caisse des dépôts et consignations. Dès son origine, elle gère les fonds de retraite des fonctionnaires. La croissance de son bilan va rapidement s’accélérer avec l’arrivée de nouveaux fonds d’épargne et de dépôts placés « sous le sceau de la foi publique » : en 1837, ce sont les fonds collectés par les Caisses d’épargne, puis par La Poste (ancêtres du Livret A), puis les fonds de prévoyance et de secours mutuel (accident du travail, vieillesse), etc. La Caisse des dépôts va accompagner, par la voie de prêts de longue durée et à faible taux, le financement d’investissements d’intérêt général : routes, canaux, voies ferrées, électrification, écoles publiques. L’idée prédominante était que la Caisse, appuyée sur son statut souple et autonome, pouvait agir directement là où le marché ne satisfaisait pas les besoins publics. Vent libéral
Dans les années 1980, le vent ultralibéral sape progressivement cette construction. La déréglementation bancaire, dès 1984, génère la filialisation, puis la privatisation d’une bonne partie des activités de la Caisse et une mise en cause de son utilité publique. Ainsi, la CNP (épargne et assurances) est filialisée, puis transformée en société anonyme, et elle est introduite en Bourse en 1998. Toujours publique, avec la participation de la CDC et de La Poste, elle figure aujourd’hui sur la liste des sociétés privatisables. Le Crédit local de France, chargé des prêts aux collectivités locales a été filialisé, privatisé, puis fusionné avec le Crédit communal de Belgique, pour devenir Dexia, une banque banalisée. Mais la mutation la plus scandaleuse touche le cœur financier de la Caisse. Au-delà de ces mouvements de privatisation, la CDC investit 30 milliards, en participations minoritaires, dans les sociétés du CAC 40. Cela ne sert ni l’emploi, ni le développement industriel, ni même la protection de ces entreprises contre d’éventuelles OPA. De la même façon, la CDC devient le principal opérateur français dans le domaine du capital investissement, et notamment dans celui de l’investissement par leverage buy out (LBO), dont on sait qu’il aboutit à l’appauvrissement des entreprises et à des exigences de rendement prohibitives ! Que fait la Caisse des dépôts dans le rachat par LBO des restaurants Quick, de la société Euro-farad ou de Cegelec ! Les sommes englouties dans ces domaines sont bien supérieures aux sommes consacrées au financement des PME et très petites entreprises créatrices d’emplois. Alors que son nouveau directeur général devrait être nommé dans les jours prochains par le président de la République, la question de la pérennité et de l’utilité publique et sociale de la Caisse des dépôts est donc désormais posée. Elle doit donner lieu à des réponses précises aux prochaines échéances électorales. Est-il possible de détruire ce dernier instrument public économique et financier ? Outil financier potentiel
Plusieurs pistes peuvent être évoquées afin de renforcer et de préciser le statut et l’utilité publique de la CDC. D’abord, il faudrait démocratiser le pilotage de l’institution. Placée théoriquement sous le contrôle du Parlement, elle est en fait gouvernée par un directeur général nommé par le président de la République. Pourquoi ne pas envisager une élection ?
Jean-Philippe Gasparotto Secrétaire du syndicat CGT de la CDC, paru dans Rouge samedi 20 janvier 2007 Financer le logement social
Il est temps de tordre le cou à quelques idées reçues en matière de logement social et de relever notamment que la politique de logement social n’a jamais dépendu, pour son financement, du recours au budget de l’État. À partir du croisement des données issues du ministère de l’Équipement, de la CDC (principal prêteur) et de l’Insee, on peut en déduire un certain nombre d’indicateurs de coûts. La très grande majorité du parc actuel (4,2 millions de logements sociaux) n’a pas été financée par le budget de l’État, mais à 80 % à partir de prêts de la Caisse des dépôts, sur la base des ressources d’épargne populaire (le Livret A), qu’elle centralise et sécurise depuis un 150 ans. Seules la masse de cette ressource considérable (195 milliards d’euros pour la totalité de l’épargne centralisée à la CDC) et sa stabilité, qui repose sur le caractère public de l’établissement, permettent de consentir des prêts aux logements sociaux à des taux intéressants sur du très long terme (entre 30 et 50 ans), sans pratiquer une sélection des projets en fonction de leur localisation ou de leur perspective de rendement. Plusieurs facteurs menacent gravement la pérennité de la ressource du livret A :
les procédures engagées par les banques privées réclamant à Bruxelles la fin du monopole de la collecte du Livret A par La Poste et les Caisses d’épargne ; la baisse des revenus des ménages - le livret A représentait 16 % du patrimoine financier des ménages en 1981, contre 3 % aujourd’hui. Face à ces menaces, il est donc essentiel d’œuvrer à la stabilité de cette ressource et à son affectation prioritaire au logement social. J.-P. G. |
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