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Pas de relance sans services publics (3/3) : le Centre Des Impôts

Dans une série de 3 articles, l’économiste Jean Marc DURAND nous démontre les ravages aux sein de la société que font les démembrements des services publics.

Chronique parue dans l’Humanité des 23, 24 et 25 février.

Les impôts, à l’heure du « front-office back-office »

Comme plusieurs de ses prédécesseurs, le gouvernement Fillon a choisi de porter le fer de la réforme de l’État au coeur des institutions financières publiques. Sous l’emprise de la RGPP (1), un démantèlement de la fonction publique dans ce domaine est à l’oeuvre. Après la direction de la concurrence et le cadastre (2), illustration avec les centres des impôts.

Sur une longue période, en particulier depuis l’entrée en vigueur des mesures Aicardi (3), les centres des impôts représentent à coup sûr la structure qui a connu le plus de modifications, de réaménagements, de réorganisations, de restructurations. Il est vrai que, du point de vue des chantres de la chasse à la dépense publique, les centres des impôts représentent un gibier de choix. Ils constituent en effet une entité assez vaste regroupant plusieurs services chargés d’assurer une multitude de missions. Gestion de l’assiette des impôts directs des personnes, des entreprises, du patrimoine et, pour une part, des impôts locaux, côtoient les missions de contrôle des dossiers des contribuables de tous niveaux de revenus et redevables de ces divers impôts. Cette grande diversité de missions s’accompagne d’autant de spécialisation de services que de spécificité de fonctions. Et ce terrain est évidemment propice à des opérations de fusion aussi diverses que dangereuses. En sept ans, 10 000 emplois ont été supprimés au ministère des Finances, dont environ 7 000 pour la seule direction générale des impôts.

Pour en vérifier les effets, il suffit de se rendre dans les services des impôts. Il n’est pas rare de trouver des bureaux déserts où des chaises vides côtoient des armoires vides. Il est vrai qu’il est de plus en plus difficile pour le contribuable d’accéder aux services. L’organisation de la réception du public selon le mode front-office back-office, méthode jusque-là utilisée par le secteur bancaire, a profondément changé la donne. Le front-office, c’est la réception du public à la chaîne. Des agents dans des box recueillent les doléances. Quant à la qualité des réponses apportées par des personnels surchargés devant faire face à une multitude de questions toutes aussi diverses les unes que les autres, cela n’est visiblement pas le souci principal. Ce qui compte, c’est de recevoir et d’aligner des statistiques.

Les questions complexes sont transmises au back-office où exercent des agents « spécialistes » en nombre réduit et qui doivent, eux aussi, faire preuve d’une grande polyvalence. C’est dans ces services que la baisse des effectifs se matérialise. Mais où est le problème puisque le public n’y a plus accès ? D’ailleurs, pour être sûr qu’un contribuable, à qui il viendrait l’idée de rencontrer le gestionnaire direct de son dossier, ne se hasarde plus dans les services, tout un système de badgage a été mis en place lui en interdisant l’accès. De là à conclure que le véritable objectif de l’organisation en front-office back-office n’est que de cacher la misère du service public…

Ce type d’évolution soulève des problèmes de trois ordres :

les effectifs, en quantité et en qualité ; un maillage harmonieux du territoire par les services de l’impôt ; la connaissance du tissu économique et fiscal par les services et la possibilité d’exploiter valablement les informations détenues. Ces interrogations soulignent l’enjeu central que représente la question de l’emploi public au sein de tels services. Face à l’introduction de nouvelles techniques informationnelles et à des évolutions incessantes de la législation fiscale, l’heure n’est pas à la compression des moyens humains, mais à leur dotation à la hauteur des besoins réels de maîtrise de la matière fiscale et de satisfaction des demandes d’information de tous les contribuables. L’heure n’est pas à la banalisation des tâches et à leur globalisation mais au maintien de réelles spécialités, en dehors desquelles le traitement des dossiers risque de rester superficiel. L’heure n’est pas à la suppression d’implantations administratives et à leur regroupement dans les villes-préfectures, mais à leur présence harmonieuse sur l’ensemble du territoire afin d’assurer une vraie mission de service public de proximité et de constituer un atout de développement des territoires, notamment ruraux.

(1) RGPP : Révision générale des politiques publiques

(2) L’Humanité des 23 et 24 février.

(3) Mesures du nom du rapporteur, M. Aicardi, adoptées au Parlement en 1987, qui ont constitué la première pièce d’un large puzzle de restructuration régressive des missions des centres des impôts.