vous êtes ici : accueil > Actualités > Générale

Vos outils
  • Diminuer la taille du texte
  • Agmenter la taille du texte
  • Envoyer le lien à un ami
  • Imprimer le texte

CHEMINOTS : l’action paie !

Des acquis ont été obtenus et des engagements ont été pris sur l’ensemble des revendications, service public et restructurations, emplois, salaires et pouvoir d’achat, portées par les cheminots et la fédération Cgt.

Après avoir contraint le gouvernement à s’engager par écrit sur la non privatisation de la SNCF et sur le maintien de toutes les lignes, la mobilisation des cheminots a obligé le Président de la République à annoncer le 22 novembre 2005 au matin que la SNCF reste et restera une entreprise publique.
La grève a également obligé la direction de l’entreprise à s’asseoir à la table des négociations ce 22 novembre 2005.
Des acquis ont été obtenus et des engagements ont été pris sur l’ensemble des revendications, service public et restructurations, emplois, salaires et pouvoir d’achat, porté par les cheminots et la fédération CGT.

L’ensemble des avancées obtenues est à mettre à l’actif de la mobilisation.

1.SALAIRES ET PENSIONS : hausse générale, prime et rattrapage

Salaires : Les cheminots ont obtenu, avant même l’ouverture des négociations salariales 2006, une majoration des salaires et pensions de 0,3 % au 1er janvier prochain. Outre cette anticipation, la mobilisation aboutit à un rattrapage des bas salaires dont plus un seul, à terme, ne devrait être inférieur au SMIC légal majoré de 10 %. Ainsi, la négociation salariale qui se déroulera dès janvier 2006 « intégrera la mise au point d’un dispositif » permettant aux salaires les plus bas d’atteindre ce « SMIC interne ». La direction a également concédé une « gratification d’au minimum 120 euros » à tous les agents au titre de l’exercice 2005. Cela sans condition alors que jusqu’à présent le versement d’une prime était refusé en raison de l’absence d’accord sur l’intéressement. Enfin contrairement à ce dernier, cette prime concourt au financement de la protection sociale. La direction entend néanmoins mettre en négociation un nouveau projet d’intéressement en 2006.

2. Emploi : moins de suppressions, plus d’embauches

La mobilisation a contraint la direction à revoir à la baisse ses projets de suppression d’emplois et à la hausse ses prévisions d’embauches. Au total, en plus de l’engagement de réaliser les 4 500 recrutements inscrits au budget 2005, la SNCF en réalisera 950 supplémentaires. L’effectif global des conducteurs sera le même en décembre 2006 qu’à la même période cette année. En plus des 500 remplacements d’agents qui partiront en retraite, les 200 postes de conducteurs qui devaient être supprimés, sont maintenus. Le service clients (information, personnes handicapées, seniors...) reçoit le renfort de 200 emplois. 100 autres embauches « contribueront à limiter la décroissance du nombre de vendeurs ». Enfin, la décision de réduire de 80 % les ralentissements sur le réseau aboutit à la création de 350 emplois au sein des établissements de l’équipement.

3. Fret : Une profonde réorientation

« Relancer le volume des trafics » précise le relevé de conclusions. « Alors que la subvention de 1,5 milliard d’euros devait servir à "une réduction des capacités" et à "une réduction du volume" des marchandises transportées par la SNCF, la négociation a abouti à ce qu’elle soit dorénavant utilisée pour le développement de l’activité », soulignent les organisations syndicales. Le relevé de conclusions prévoit ainsi que « l’outil de triage fera l’objet d’un programme de modernisation », que « les sites de tri qui ont été récemment gelés seront maintenus en état de fonctionnement » et que « le réseau actuel de points de livraison et d’enlèvement sera maintenu ». Enfin, « une table ronde aura lieu dans le mois de décembre pour examiner l’état du plan fret et ses résultats ».

4. Vente : complémentarité au lieu de la concurrence

Les organisations syndicales dénonçaient une mise en concurrence des canaux de distribution (guichet, borne automatique, Internet et téléphone). Le relevé de conclusions engage la direction à veiller à « leur bonne complémentarité ». Selon les syndicats, la totalité de la gamme des produits devra être désormais proposée par l’ensemble des canaux de distribution.

5. Restructuration :entre gel et abandon

La direction a été contrainte de revoir profondément sa copie. Plusieurs projets concernant les achats, la comptabilité, les bureaux administratifs, l’évolution des établissements et l’organisation du travail sont soit gelés, soit différés, soit abandonnés. Selon les syndicats, ces projets étaient porteurs d’une logique de rentabilité au détriment de la qualité et de la proximité nécessaire au service public. Ils se traduisaient par des suppressions d’emplois et une hausse de la productivité exigée de chaque agent.

6. Conducteurs :La traction unique préservée

Le relevé de conclusions satisfait, selon les syndicats, « 90 % des revendications propres au conducteur ». Le projet d’éclater la traction entre les différentes branches d’activité est abandonné. Celui de porter à six heures le temps de conduite de nuit des agents est gelé dans l’attente d’une négociation spécifique sur ce sujet. Les sites traction menacés sont maintenus.

7. Filiales :dissolution d’ID TGV

La filiale de vente par Internet de billet TGV, qui jouissait du monopole de la vente de certains produits, est dissoute. « Le produit ID TGV dans sa consistance et ses caractéristiques actuelles est intégré au sein de la SNCF. » Cette décision conduit, selon les syndicats, à mettre fin à la concurrence entre cette filiale et les autres canaux de distribution. Le risque de privatisation est donc écarté.

Ces avancées sont à mettre au crédit de l’action des cheminots dans un contexte politico-médiatique exécrable rarement égalé dans et hors entreprise.

C’est ainsi pour la majorité parlementaire qui n’a pas manqué de fustiger les cheminots et le service public, avec l’appui des médias qui se sont prêtés à ce jeu dangereux.

C’est encore vrai dans l’entreprise avec une direction qui a usé et abusé d’une communication agressive vis-à-vis des fédérations qui ont appelé à la grève et notamment de la CGT.

De même les fédérations CFDT et CFTC, reprenant à leur compte les arguments de la direction, des médias, et du gouvernement, ne sortent pas grandies d’avoir combattu la grève.

Nos détracteurs en sont pour leurs frais au regard des acquis du 22 novembre 2005.

La fédération CGT des cheminots réaffirme qu’il était indispensable d’aller à l’action. Elle tient à féliciter les cheminots. En participant à la grève, ils ont su résister à la pression et fait preuve de responsabilité pour défendre le service public SNCF, l’entreprise publique intégrée, l’emploi, les salaires et leur statut.


Réactions des secrétaires des syndicats ayant appelé au mouvement :

Éric Falempin (FO) :« Les syndicats peuvent encore gagner aujourd’hui ! »

« Si la SNCF n’a pas répondu à la hauteur de ce que FO souhaitait, il y a eu une négociation, comme il n’y en avait pas eu depuis des années et les cheminots ont réussi à obtenir certaines de leurs revendications. Cela démontre que les syndicats, qui ont subi des échecs ces derniers temps, peuvent encore gagner aujourd’hui. Parmi les points forts marqués, ID TGV, filiale qui demain aurait vraisemblablement été privatisée va être réintégrée à la maison mère. On obtient un doublement de la gratification exploitation qui est soumise à cotisations patronales, à la différence de la prime d’intéressement qui, elle, est aléatoire. Les 0,3 % d’augmentation générale au 1er janvier constituent un rattrapage du pouvoir d’achat qui, malgré l’accord signé par quelques syndicats était au-dessous de l’évolution des prix. S’agissant des restructurations, on freine un peu la démarche de l’entreprise. Pour le plan fret, il y a une redynamisation. Au niveau des guichetiers, le nombre des suppressions d’emplois est réduit, et on va embaucher 200 personnes supplémentaires à l’accueil. À l’équipement, c’est 350 agents en plus. Et on a la garantie que le nombre d’agents à la traction ne diminuera pas en 2006, malgré 700 départs en retraite.

Après 24 heures de grève des cheminots, le président Chirac a déclaré solennellement qu’il tenait au service public ferroviaire, alors qu’il lui avait fallu quinze jours pour réagir à la crise des banlieues. On va pouvoir s’appuyer sur les discours qui ont été tenus pour que le gouvernement agisse comme il faut au plan européen, d’où le danger de privatisation vient. »

Christian Mahieux (SUD rail) :« Un recul de la direction au premier jour n’est pas habituel »

« Sous la pression des grévistes et dans la crainte du préavis reconductible, de la possibilité de liens avec des mouvements dans d’autres secteurs, la direction a ouvert des négociations et le relevé de conclusions fait apparaître un certain nombre d’avancées. Il y a eu visiblement des ordres du gouvernement et on a vu l’intervention du président de la République. Une telle intervention, même si elle ne constitue pas en soi une garantie, et un recul de la direction au premier jour d’un conflit social ne sont pas habituels. Cette négociation à chaud a permis de remettre en cause un certain nombre de restructurations de l’entreprise, de débloquer des choses en termes d’effectifs et d’annoncer des mesures salariales qui sont des avancées significatives. À travers cet exemple, les cheminots, les salariés peuvent voir qu’une grève unitaire et reconductible permet d’engranger des résultats. C’est un atout pour être encore plus forts et nombreux dans l’avenir pour obtenir des avancées encore plus importantes et notamment revenir sur la privatisation qui reste, même si des garanties verbales ont été données, une question posée à la SNCF. »

William La Rocca (FGAAC) : « 700 emplois pour la traction, ce n’est pas rien ! »

« La mobilisation des agents de conduite a été massive. La direction a reconnu 50 % de grévistes à la traction. Pour nous, si l’on prend en compte le taux d’absence un jour ordinaire, on arrive à 65 %. Le 4 octobre, la FGACC n’appelait pas à l’action, on dénombrait 40 % de grévistes à la traction. Nous avons obtenu du concret. Si l’on regarde les mesures générales, concernant les emplois créés, les 0,3 % d’augmentation de salaire au 1er janvier, la prime, on ne peut pas cracher dans la soupe. Sept cents emplois pour la traction, ce n’est pas rien ! Cela signifie que tous les départs à la retraite l’an prochain seront remplacés. Une première depuis quatre, cinq ans. Concernant la traction spécifiquement, certaines mesures répondent à notre préavis. Par exemple, la réaffirmation de l’unicité de la traction dans une entreprise intégrée. Sur d’autres points, on nous renvoie à d’autres négociations, notamment sur le travail de nuit, avec une ouverture, enfin, de la direction qui ne fige plus les choses sur 6 heures (au lieu de 4 heures actuellement - NDLR) de conduite et laisse la porte ouverte à un compromis. On va rentrer dans ces futures négociations avec la légitimité de cette mobilisation. Un point négatif : la nouvelle politique, catastrophique, du management à la traction, est maintenue. Dans les prochains mois, il y aura donc sans doute des coups de semonce. »

Didier Le Reste (CGT) :"Nous engrangeons des résultats non négligeables"

« Depuis un an, nous menons des actions très fortes à la SNCF avec des manifestations, des journées de grève. Là, nous engageant, nous venons de hausser le ton et le mouvement permet d’engranger des résultats non négligeables. Nous avons arraché la création de 950 emplois, qui vont permettre d’embaucher des jeunes et d’améliorer la qualité du service public. Plusieurs mesures lâchées par la direction portent un coup à l’entreprise d’externalisation d’activités de la SNCF, donc participent de notre action contre la remise en cause du service public. Sans cette mobilisation sociale, nous n’aurions jamais obtenu de véritables négociations, le gouvernement n’aurait jamais acté par écrit de l’engagement de ne pas privatiser la SNCF. Jacques Chirac a été obligé de sortir du bois et je ne fais pas la fine bouche quand il annonce que la SNCF est et restera publique. Cela n’est pas anodin dans une période où nous touchons le noyau dur de la stratégie libérale qui consiste à tout privatiser, à casser les services publics et les droits sociaux. »


RETOUR SUR UN DÉCHAÎNEMENT MÉDIATIQUE

De mémoire de syndicaliste, on a rarement vu ça ! Le pilonnage politique et médiatique contre la grève des cheminots a concentré pendant plusieurs jours ses feux sur la CGT. Ainsi, après avoir jugé « corporatiste » le conflit des marins de la SNCM, accusé celui des traminots de Marseille d’être « sans objet », les médias se sont acharnés contre les cheminots et leur principal syndicat. Le 22 novembre, sur Europe 1, Jean-Pierre Elkabach questionnait : « Bernard Thibault est-il ligoté par la CGT de la SNCF ? » Le Figaro affichait en une : « SNCF, le coup de force de la CGT », et le Parisien se demandait : « À quoi joue la CGT ? » Alors que le mouvement de grève reconductible a été décidé après huit journées d’actions « classiques », qui n’ont pas permis aux cheminots d’être entendus, qu’il a été porté par quatre syndicats qui représentent plus de 71 % des personnels, qu’il revient aux agents dans leurs assemblées générales de décider chaque jour de la poursuite ou non d’un mouvement, les médias ont voulu accréditer la thèse que cette grève n’avait pas de justification sociale, les lignes éditoriales s’alignant sur l’idéologie développée par le premier ministre .

Cette grève aurait été " politique " et aurait permis à la CGT cheminots , selon Le Figaro, d’affirmer sa toute-puissance à la SNCF et de crédibiliser « une ligne dure » au sein de la confédération dans la perspective du congrès. Ainsi, les problèmes soulevés par les cheminots n’existeraient pas. Soyons sérieux. Qui peut prétendre sans sombrer dans le ridicule que la privatisation des entreprises publiques dans ce pays est un « non-sujet » ? La SNCM vient d’être privatisée. Les grévistes de la RTM ont lutté parce qu’il est question de livrer progressivement au privé l’exploitation du tramway marseillais. Quinze pour cent du capital d’EDF vient d’être mis en Bourse, quelques mois après l’entrée sur le marché de GDF. Le congrès des maires de France, qui se tient en ce moment, s’inquiète devant la disparition des services publics en zone rurale. L’explosion de la banlieue vient de mettre au grand jour la très grave pénurie de services publics dans ces zones urbaines( Voir le dernier rapport de L’Observatoire des Zones Urbaines Sensibles paru le 24/10/2005). Et la SNCF serait indemne de toute menace ? À qui veut-on faire croire pareille sornette ?

En matière de réseau ferré, toutes les directives européennes organisent l’ouverture au privé du trafic ferroviaire, le fret d’abord, le trafic voyageurs ensuite. Toutes les réorganisations de l’entreprise visent à préparer l’entreprise à cette emprise élargie des logiques libérales. Cette libéralisation a déjà ouvert la voie aux premiers trains privés de la Connex en Lorraine.

En fait, cette opération de matraquage politique et médiatique vise essentiellement à jeter le discrédit sur l’action revendicative, en cherchant à dissuader les salariés d’utiliser la grève comme moyen d’expression. C’est une constante de ce gouvernement, qu’aucun premier ministre n’a démenti : qui conteste sa politique est immédiatement rangé dans le camp des ennemis de la réforme. Il n’est de syndicalisme acceptable que s’il accompagne les réformes libérales. Les grèves des marins de la SNCM, des traminots de la RTM et des cheminots de la SNCF bousculent ce schéma parce qu’elles posent la question du devenir des services publics.

L’objectif gouvernemental est quant à lui de discréditer le syndicalisme qui se bat et pas uniquement celui qui conteste mais également celui qui fait des propositions. Le mouvement social est ainsi considéré comme un obstacle aux projets libéraux. Il faut donc le casser et le faire taire.

Pour la CGT, la négociation sociale et les compromis qui peuvent en découler n’ont de raison d’être que s’ils s’appuient sur un rapport de forces qui est le plus à même de permettre des avancées favorables aux salariés.

Les résultats obtenus par les cheminots au lendemain de leur journée de grève sont là pour démontrer que cette démarche n’est pas erronée, bien au contraire.

Article publié le 28 novembre 2005.


Ce site est réalisé par le syndicat et propulsé par SPIP.